Elements constitutifs du dommage corporel
I- INTRODUCTION :
La justification du dommage exige la réunion de trois éléments:
A - le dommage physique
B - le traumatisme en cause
C - l'imputabilité médico-légale (lien de causalité)
A- Le dommage physique :
C'est l'atteinte à l'intégrité ou à la santé du corps humain; il ne s'agit pas seulement de reconnaître une infirmité physique (impotence fonctionnelle, mutilation), ou un dommage esthétique mais de justifier aussi éventuellement une déperdition de force, une déchéance physique ou l’existence de troubles subjectifs.
l'exagération et la simulation de la victime rendent l’examen clinique plus difficile..
B- le traumatisme :
C- Imputabilité :
a - Examen des critères d’imputabilité.
b - Déduction et conclusion.
a - Critères d’imputabilité :
Ces critères ont été dégagés au fil du temps par différent auteurs pour guider le médecin expert dans une tache aussi fondamentale que délicate. Ils sont au nombre de sept (07):
1- la réalité et l’intensité du traumatisme:
Il appartient au plaignant de fournir les éléments de preuve de la réalité du traumatisme ( certificat médical initial, rapport médical, radiographies…)
Ceci permettra d’apprécier le degré de cohérence existant entre: les circonstances de l’accident, la réalité et intensité du traumatisme et les conséquences physiques et psychiques.
2- Nature de l’affection :
L’analyse du fait médical, l’examen du dossier médical, du certificat initial, l’examen clinique du blessé, peuvent conduire le médecin expert à admettre la vraisemblance scientifique de la causalité médicale ou au contraire l’invraisemblance de cette causalité.
3- La concordance du siège :
C’est entre le traumatisme et les séquelles.
En principe le traumatisme doit avoir atteint soit directement soit par retentissement immédiat l’organe siège de la maladie ou de lésion. Cependant cette lésion peut se trouver à distance du point d’impact.
4- La continuité évolutive (enchaînement anatomo-clinique) :
Le lien ininterrompu entre les phénomènes morbides indiquent que chacun est l’effet de celui qui le précède et en même temps la cause de celui qui suit.
5- Condition de temps (Délai d’imputabilité) :
Les connaissances médicales et l’expérience du médecin expert lui permettent d’apprécier la cohérence du délai écoulé entre l’accident et l’apparition des troubles. Ce délai varie selon la nature des troubles.
Si les blessures et lésions sont :
immédiates le lien étiologique est évident
tardives le lien de causalité est discutable
s' il y a une période intercalaire silencieuse+/- longue on s'appui sur des considérations pathogéniques ou cliniques ou sur des observations antérieures
6- La nouveauté d’apparition des lésions :
7- l’exclusion d’une cause étrangère à l’accident:
EFFET GENERATEUR FAIT CONSECUTIF
(accident) (séquelles)
CAUSES ETRANGERES
b- Déductions et conclusions :
1 - La causalité est, ou n’est pas établie avec certitude.
2 - La causalité est douteuse, hypothétique.
3 - La causalité n’est que partielle ou indirecte.
4 - La causalité indirecte.
1 - la causalité est, ou n’est pas établie avec certitude :
Le médecin expert ne nourri aucun doute, soit il acquit :
2- La causalité est douteuse :
3- La causalité est partielle ou indirecte :
C’est l’hypothèse où l’accident et ses conséquences sont une cause parmi plusieurs d’autres ayant contribué au préjudice corporel final.
Le mécanisme plurifactoriel se rencontre fréquemment en présence d’un état antérieur pathologique ou prédisposant.
L’expert doit se poser trois questions:
Ayant répondu à ses trois questions, le médecin expert sans trop de difficultés, exposer les arguments qui l’amènent à formuler l’un des trois avis suivants :
Soit le traumatisme a joué un rôle aggravant d’une incapacité ou d’une pathologie qui existait mais dont les effets, en l’absence d’accident, auraient été moindres.
4- causalité indirecte :
Il y’a alors rupture du lien de causalité direct par suite d’événements nouveaux.
c- les règles médicolégales d’imputabilité : si
Exp : état psycho névrotique post traumatique.
Exp : un AVP avec une commotion sans blessure sur cardiopathie antérieure grave susceptible d’entrainer la mort dans un proche avenir.
Dans les cas d’imputabilité partielle, le médecin expert renseigne le tribunal sur :
A- CATEGORIE DU DOMMAGE :
1- Dommage patrimonial ou économique :
Méthode descriptive et laisse le juge fixé la somme correspondante(elle est aléatoire et actuellement non utilisée).
Méthode quantitative qui selon un barème réglementaire fournit un % d’incapacité que le juge devra traduire en argent en prenant compte l’âge, la nature et la qualité de la profession en correspondance avec le type de dommage ( exp: une amputation de la main gauche pour un intellectuel ou un employé du secteur tertiaire est moins grave qu’elle ne l’est pour un artisan).
2- Dommage extrapatrimonial:
- Pretium doloris :
Pour évaluer son importance et permettre au juge d’en fixer le prix , l’expert va la qualifier (important, moyen, faible).
- Le préjudice esthétique :
1: très léger; 2 : léger; 3 : modéré; 4 : moyen; 5 : assez important; 6 : important; 7 : très important.
- le préjudice d’agrément :
- Préjudice juvénile :
B- accident de droit commun :
Le médecin expert procède à l’estimation du dommage physique en réunissant des éléments médico-légaux: la date de consolidation; ITT; taux successifs de l’invalidité; préjudice esthétique; pretium doloris, l’IPP.
1- La consolidation médico-légale :
2-L’incapacité temporaire :
ITT: correspond aux gains manqués durant la période d’incapacité, ne touche que les victimes ayant une activité professionnelle (préjudice économique professionnel).
Elle est facile à établir, entre la date du fait dommageable et la date de reprise effective du travail.
ITP: si le travail n’a été repris que partiellement dans le temps ou dans le volume d’activité.
Elle est alors affectée d’un coefficient par rapport à l’activité partielle.
Elle s’étend jusqu’à la reprise totale d’activité.
3- Les taux successifs de l’invalidité :
Pendant les différentes phases de la période d'incapacité temporaire, les taux d'invalidités vont en décroissant par palier. L’invalidité est à 100% initialement et elle diminue jusqu’à la reprise du travail.
Lors d'un accident de travail, le taux de 100% s'étant jusqu'au jour de la reprise du travail ou de consolidation complète.
4- le degré d’incapacité permanente : exprimé en %
Les déficits fonctionnels séquellaires affectent et diminuent la capacité physique harmonieuse.
L'expert établit le degré de l'IPP en se référant aux indications contenues dans les barèmes d'invalidité, il est en fonction des séquelles.
5- degré de l’incapacité permanente :
- Il n’est pas permis à l’expert de faire une évaluation personnelle de ce taux car il doit pouvoir justifier son estimation en invalidité.
- Les taux mentionnés dans les barèmes indicatifs représentent théoriquement la dépréciation anatomo-physiologique consécutives aux séquelles et infirmités post traumatiques et leur répercutions sur la capacité générale de travail.
C- Détermination du taux d’invalidité :
Il repose sur :
- La nature de l’infirmité.
- L’ âge ; l’état général; la profession.
- Le degré de réduction de la capacité fonctionnelle.
- L’état mental et les attitudes de la victime.
- Le barème indicatif d’évaluation de l’invalidité.
le taux global de l’invalidité est obtenu par l’addition des incapacités partielles calculées et non pas l’addition des incapacités partielles considérées isolément, sinon IPP > 100%.
1- Dans le cas où les lésions affectent des fonctions distinctes :
Les infirmités intéressant les organes non synergiques(œil-main,jambesbras
le 1er taux est retenu intégralement, les suivants sont multipliés par une fraction dont le numérateur est la capacité restante et le dénominateur 100.
FORMULE DE BELTHAZARD.
Exemple : une victime d'accidents présente 03 infirmités dont les taux d'incapacités ont été évalués à 60%, 20% et 10%
* la première incapacité est retenue intégralement. I 1 = 60%
* la deuxième est calculée comme suite : 100 – 60 = 40% I 2 = 8%
20 x 40/100 = 8%
* la troisième : 40 – 8 = 32% I 3 = 3,2%
10 x 32/100 = 3,2%
Le taux globale de l’invalidité = I 1 + I 2 + I 3 = 60 + 8 + 3,2 = 71,2%
Lorsque le taux global rectifié approche de 100% sans pouvoir l’atteindre l’expert propose l’incapacité totale.
2- Dans le cas où les lésions affectent la même fonction : sont dits organes synergiques (les yeux, les bras, les jambes)
L’addition des incapacités partielles calculées fournit généralement un résultat trop faible par rapport à la perte fonctionnelle subie car l’impotence d’une lésion agit directement sur l’autre pour l’aggraver.
Exp: la taux global d’incapacité calculée pour la perte de 4 doigts d’une main est de 38,6 % alors qu’il de l'ordre de 50 %dans la barème.
Signalant que plusieurs méthodes ont été proposées pour ce problème, cependant les opinions diffèrent dans des proportions importantes
L’expert, dans ce cas précis peut s’entourer d’avis de spécialiste. Ses conclusions devront être aménagées, voire prudentes.
C1 : la capacité restante du sujet avant l’accident en cause.
C2 : la capacité globale restante après l’accident en cause.
cette formule a ses limites et que son utilisation exposerait à des aberrations en particulier si C1 est très élevé et C2 peut varié dans des proportions considérables. Elle est utile en cas d’aggravation de C1 par C2.
IV- CONCLUSION :
Pour mener à bien sa tâche, il est indispensable que le médecin expert s’imprègne de connaissances spécifiques et œuvre de bon sens en se souvenant de la mise en garde d’ARISTOTE déconseillant d’attribuer « la cause d’un effet à une chose qui n’en est point la cause, et le tout par ce que ces deux choses-là ou auront été faites en même temps ou l’une incontinent après l’autre… ».
Bibliographie :
Précis de médecine légale judiciaire : C. SIMONIN
La réparation juridique du dommage corporel : L. DEROBERT
L’ expertise médicale en responsabilité médicale et en réparation d’un préjudice corporel : J. Hureau et D. Poitout.
Dommage corporel, assurance de personnes, organismes sociaux
G. CREUSOT /G DUMASDELAGE/C. CARBONNIE/ D.ROUGE