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FACULTÉ DE MÉDECINE D'ORAN CENTRE HOSPITALO-UNIVERSITAIRE  SERVICE DE MÉDECINE LÉGALE

La personnalité criminelle

21 Juin 2013 , Rédigé par Med Leg CHUOran Publié dans #criminologie

  • Notions générales sur la personnalité

Le terme personnalité est issu du mot personne qui lui-même vient du latin persona qui désignait les masques portés par les acteurs de théâtre. Les masques, en nombre limité, correspondaient à des caractères fixes à partir desquels les spectateurs pouvaient s’attendre à des comportements ou à des attitudes déterminées. En effet, la vie sociale a besoin de prévisibilité du comportement d’autrui.

La personnalité se définit, chez un sujet donné, comme le résultat de l’intégration dynamique de composantes cognitives (perception et vision de soi-même, d’autrui et des événements, pensées, fonctions intellectuelles supérieures), émotionnelles (affects, adéquation de la réponse émotionnelle en fonction de la situation), et comportementales (contrôle des impulsions). L’agencement de ces différents facteurs constitue les traits de personnalité, c’est-à-dire les modalités relationnelles de la personne. Un même individu peut posséder des traits de personnalités différentes, pouvant même se modifier en fonction des moments de crise ou des situations particulières de la vie. Ces tendances donnent à la personnalité sa dynamique. La personnalité est stable, contribuant à la permanence de l’être qui aura tendance à répondre de la même manière face à une même situation (notion de prédictivité). Elle est également unique, rendant le sujet reconnaissable, distinct des autres. Elle rend compte de l’originalité de chacun.

La personnalité devient pathologique lorsqu’elle se rigidifie. Les réponses deviennent inadaptées à une situation donnée. Le sujet est en souffrance. Le fonctionnement social ou professionnel en est altéré. Un trouble de la personnalité est une modalité durable de penser, de ressentir et de se comporter, qui est relativement stable dans le temps. Le diagnostic de personnalité pathologique doit tenir compte de l’origine ethnique, culturelle et sociale du sujet. Il ne peut être réalisé lorsque le sujet souffre d’un trouble psychiatrique

 

  • La « personnalité criminelle » selon Jean Pinatel

 

L’idée de l’existence d’une « personnalité criminelle » spécifique a connu un certain succès dans les années 1950 à 1970. Elle a été soutenue par de nombreux psychiatres et psychanalystes et continue quelques fois encore à être appliquée aujourd’hui, notamment dans l’élaboration de tests psychologiques et des grilles d’évaluation psychiatrique.

Jean Pinatel (1913-1999), président de la société internationale de criminologie de

1950 à 1978, en a décrit les principaux aspects dans son « Traité de droit pénal et de criminologie » (1970) 39. Pour lui, le criminel se distingue du non criminel par une aptitude particulière à passer à l’acte. Ce dernier obéit à quatre conditions : une condition morale (le criminel s’affranchit de l’éthique posée par la société), une condition pénale (la sanction pénale ne remplit pas son rôle dissuasif à l’égard du criminel), une condition matérielle (l’acte ne pose pas de difficulté d’exécution) et une condition affective (le acriminel n’est pas inhibé par le sentiment du bien ou du mal). Quatre traits psychologiques correspondent respectivement à ces quatre conditions : l’égocentrisme, la labilité, l’agressivité et l’indifférence affective. L’égocentrisme est la référence continue à soi-même. La labilité suppose l’incapacité pour le criminel de prévoir les conséquences de ses actes, seul domine le plaisir du criminel. L’agressivité est engendrée par l’intolérance à la frustration. L’indifférence affective est caractérisée par une dévalorisation de la victime par le criminel. Cette dernière condition est la plus importante de toutes : sans elle le passage à l’acte devient impossible.

 

Pinatel considère ces traits psychologiques comme « le noyau dur » de la personnalité criminelle. Mais il existe des variables qui peuvent appuyer le passage à l’acte ou au contraire le freiner. Ces variables sont induites par la société, les aptitudes physiques ou intellectuelles du délinquant ou criminel, ou encore les besoins instinctuels de ce dernier (sexuels, de nourriture…). Cependant Pinatel exclut de son raisonnement les « personnalités anormales » Ces dernières subissent leurs actes, tandis que celui qui possède les traits d’une personnalité criminelle possède la faculté de se rétracter à tout moment. Ainsi pour Pinatel, le passage à l’acte est déjà inscrit dans la personnalité de l’auteur. Il sommeille dans le psychisme de l’individu et seules les circonstances peuvent en faciliter l’expression.

 

  • Facteurs de risque criminel

 

Certaines variables en relation avec la dangerosité pour autrui sont fréquemment mises en évidence dans les travaux portant sur la violence et le risque de récidive. En France, il est habituel de différencier les facteurs de dangerosité psychiatrique de ceux proprement criminogènes (dangerosité criminologique). Les relations statistiques entre trouble mental et crime violent rendent cette dichotomie volontiers arbitraire et peu pragmatique en pratique médicolégale. Outre l’âge –15 à 30 ans – et le sexe masculin, nous classerons ici l’ensemble de ces indicateurs pronostiques selon un plan différent, plus adapté à l’évaluation d’un individu susceptible de commettre une agression contre autrui ou de récidiver.

 

 

  • Prédicateurs liés à l’enfance du sujet : Les prédicteurs sont :

 

– milieu familial brisé et abusif ;

– brutalités parentales, événements traumatiques ;

– perte précoce d’un parent ;

– éducation froide, hostile, permissive ;

– manque de supervision des parents ;

– placements familiaux ou institutionnels ;

– tendances incendiaires, énurésie et cruauté envers les animaux ;

– échec scolaire.

 

  • Prédicateurs liés aux antécédents criminels : Ce sont :

 

– précocité de la délinquance violente ;

– multiplicité et gravité des infractions ;

– condamnations pour violences physiques ou sexuelles ;

– non-lieux pour troubles mentaux.

 

  • Prédicateurs liés à l’état mental : Les prédicteurs sont :

 

– immaturité psychologique, intellectuelle et morale ;

– mentalisation et verbalisation déficientes ;

– introspection difficile ;

– incapacité à communiquer avec autrui ;

– caractère extraverti avec anxiété ;

– personnalité psychopathique-limite ;

– troubles psychotiques ;

– conduites addictives ;

– impulsivité pathologique, perte de contrôle ;

– automutilations ;

– fantasmes déviants agressifs, sexuels, incendiaires, sadiques ;

– comportement imprévisible, irrationnel ;

– colère, hostilité ou ressentiment chroniques ;

– égoïsme, absence de compassion, inaffectivité ;

– hyperémotivité, instabilité émotionnelle ;

– fanatisme politique, religieux.

 

  • Prédicateurs liés au mode de vie et aux attitudes sociales : Ce sont :

 

– inadaptation sociofamiliale ;

– absence d’emploi ;

– marginalité, toxicomanie, prostitution ;

– port d’arme, accès à des instruments de violence ;

– conduite automobile dangereuse, autres conduites à risques ;

– fréquentation des délinquants ;

– attitude de victime, vécu d’injustice, critique de la société ;

– négation ou minimisation des actes violents passés.

 

  • Prédicateurs liés à la situation précriminelle : Ce sont :

 

– situation de crise ;

– état de stress ;

– apparition d’un état dépressif ;

– idées de suicide ou d’homicide ;

– abus d’alcool et de stupéfiants ;

– activité et intensité des symptômes psychiatriques ;

– épisode fécond délirant ;

– forte intentionnalité de faire mal ;

– plan concret d’agression.

 

  • Prédicateurs liés à la victime virtuelle : Les prédicteurs sont :

 

– proximité affective et géographique de la victime ;

– menaces de mort à l’endroit de la victime ;

– désignation nominale d’un persécuteur ;

– victime hostile, provocatrice, dépendante, imprudente, jeune, de sexe féminin, handicapée, malade mentale, privée de liberté.

 

 

  • Prédicateurs liés à la prise en charge : Il s’agit :

 

– d’échec répété des tentatives de réinsertion ;

– d’absence de projets d’avenir réalistes ;

– d’attitude négative à l’égard des interventions ;

– du manque de référents médical et social ;

– de mauvaises relations avec l’entourage personnel et soignant ;

– d’absence, refus, inefficacité du traitement psychiatrique.

 

L’analyse de ces prédicateurs et leur association peuvent donner une bonne indication de l’importance du risque statistique théorique de passage à l’acte violent et de récidive. Le reste est affaire d’éléments circonstanciels, situationnels ou tenant à la nature et à l’attitude de la future victime. Parmi ces prédicateurs de dangerosité, les traumatismes physiques et sexuels dans l’enfance, la délinquance précoce, l’échec scolaire, l’immaturité, l’inadaptation professionnelle, les conduites addictives et les troubles mentaux tiennent une place importante. Le meilleur indicateur du risque de récidive criminelle reste cependant la fréquence et le type des antécédents judiciaires, la probabilité qu’une personne commette des actes de violence étant considérablement plus forte si celle-ci a déjà été violente par le passé.

Les troubles des conduites dans l’enfance, le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité exposent à un risque plus élevé de comportements antisociaux graves ou criminels à l’adolescence et à l’âge adulte.

Malgré l’intérêt clinique et épidémiologique de ces paramètres corrélés à la dangerosité et à la récidive, il nous faut insister sur l’incertitude du pronostic d’un passage à l’acte violent. Les prévisions doivent en effet laisser une place à l’inattendu en matière d’activités humaines et aux circonstances, ces dernières étant une variable aléatoire, un élément conjoncturel. Il est cependant possible de prévoir qu’un individu se trouve dans une situation à risque de

violence, surtout si ses antécédents sont connus.

L’estimation de la probabilité d’une violence ultérieure passe par l’utilisation d’instruments ou de guides permettant au praticien de ne rien oublier d’essentiel et complétant les données objectives et subjectives de l’examen clinique. Ces instruments statistiques d’évaluation du risque ont bien entendu leurs limites . Plusieurs tests et échelles ont été proposés mais le protocole d’évaluation HCR-20 paraît avoir actuellement la faveur de la majorité des professionnels, en particulier au Canada.

Les principaux prédicateurs de récidive générale ont été résumés récemment dans une importante méta-analyse . Les facteurs statiques sont par ordre d’importance décroissante les antécédents criminels, l’âge, les méthodes d’éducation parentale, les antécédents de comportement antisocial dans l’enfance ou l’adolescence, l’ethnicité, la structure familiale, le sexe masculin, le fonctionnement intellectuel, le statut socioéconomique. Les facteurs dynamiques sont l’existence d’une personnalité antisociale, la fréquentation des délinquants, les comportements antisociaux, un conflit interpersonnel, l’absence de réussite sociale, l’abus de substances, la détresse personnelle.

Récemment, Hare et al ont élaboré la Revised Psychopathy Checklist (PCL-R) très utilisée actuellement dans les pays anglosaxons et au Canada. Le PCL-R comporte deux facteurs : un facteur 1 concernant les aspects relationnels : égocentrisme, manipulation, rudesse, absence de remords (caractéristique psychopathique nucléaire) ; le facteur 2 concerne l’impulsivité, l’instabilité et un style de vie marqué par l’irresponsabilité. Des scores élevés au PCL-R sont corrélés avec un récidivisme important d’agressions violentes.

Il existe une traduction française : l’échelle de psychopathie de Hare.

La prédiction de la violence par les cliniciens se traduit cependant par une proportion importante – 65 à 86 % – de faux positifs avec une surestimation du risque individuel, ce qui pose d’évidents problèmes éthiques. Une voie de recherche intéressante pourrait être l’étude des facteurs protecteurs de la récidive en s’intéressant aux délinquants ne récidivant pas.

 

  • Aspects neurobiologiques

 

Les recherches sur la neurobiologie de la violence tentent de découvrir des marqueurs (anatomiques, biochimiques, génétiques) permettant une meilleure compréhension de ses causes et mécanismes intrinsèques. Ces études tentent également de trouver des molécules pouvant agir sur les voies nerveuses qui fonctionneraient anormalement chez les personnes présentant des troubles mentaux et des accès récurrents de violence.

De nombreuses structures cérébrales sont impliquées dans l’agressivité dont l’aire septale, l’hippocampe, l’amygdale, le noyau caudé, le thalamus, l’hypothalamus ventromédian, le mésencéphale, le tegmentum, le pont ou les noyaux du raphé. La participation du cervelet a également été invoquée. Le cortex préfrontal apparaît comme un régulateur. Parmi les neuromédiateurs, la sérotonine, l’acide c-aminobutyrique (GABA), la noradrénaline interviendraient dans l’inhibition des comportements agressifs, la dopamine et le glutamate ayant à l’inverse un rôle excitateur. Des modèles animaux d’agressivité sont décrits depuis longtemps en relation avec une altération de la transmission de la sérotonine liée à une mutation d’un gène, à des lésions de voies nerveuses spécifiques ou à l’administration de substances inhibitrices.

Les premières études montrant une association entre une faible concentration d’acide 5-hydroxyindoléacétique (5-HIAA), principal métabolite de la sérotonine dans le liquide céphalorachidien (LCR), et des comportements suicidaires de nature impulsive et violente ont été largement reproduites dans plusieurs pays. Un certain nombre de recherches ont également montré que des délinquants violents impulsifs ont des concentrations en 5-HIAA dans le LCR significativement plus basses que les sujets contrôles.

Linnoila et al retrouvent cette différence en comparant des auteurs d’infractions violentes, impulsives et non impulsives. Des concentrations basses en 5-HIAA dans le LCR ont par ailleurs été constatées chez des incendiaires et des meurtriers récidivistes.

Pour les hommes alcooliques violents ou incendiaires, ce trait a été retrouvé associé à des antécédents familiaux de violence paternelle et d’alcoolisme. Les délinquants violents présentant ce trait biologique ont davantage d’antécédents suicidaires et un taux de récidive criminelle plus élevé. Ce caractère biologique a également été observé chez des auteurs de libéricides ou de tentatives de libéricides ayant ensuite tenté de se suicider. Des facteurs familiaux ont été observés dans des études longitudinales, l’agressivité précoce étant un prédicteur de comportements antisociaux et criminels, cette agressivité se retrouvant sur plusieurs générations.

L’ensemble des travaux concernant la sérotonine montrent qu’une certaine forme d’impulsivité, une agressivité excessive ou une incapacité à contrôler les pulsions agressives sont les variables comportementales associées à de faibles concentrations de 5-HIAA dans le LCR, indépendamment du groupe diagnostique et de l’acte commis. Il s’agit d’un « trait » génétiquement transmis. Il est très probable que des facteurs épigénétiques potentialisent ces facteurs de risque : maltraitance et carences parentales pendant l’enfance. Les recherches de la génétique ont essentiellement porté sur l’existence d’un chromosome X ou Y supplémentaire, un risque de criminalité plus élevé pouvant cependant passer par d’autres facteurs : faible niveau intellectuel, mutation ponctuelle rare d’un gène lié à l’X sans anomalie du nombre de chromosomes. Les études sur les jumeaux et les adoptés sont en faveur de l’intervention à la fois de facteurs de risque génétiques et d’environnement.

 

Nous ne devrions plus nous contenter d’une évaluation purement clinique ou actuarielle des comportements criminelsles plus graves. Des examens complémentaires d’exploration du système nerveux central (imagerie cérébrale) et biologiques sont maintenant justifiés.

 

  • Infractions médicolégales

 

  • HOMICIDE

L’homicide franchement pathologique est réalisé par un agresseur unique, sans signes de participation de complices éventuels. La scène du crime témoigne d’un comportement désorganisé et violent, le mobile paraissant inexistant ou illogique. La victime présente des blessures multiples, témoignant d’un acharnement excessif et ne touchant pas spécifiquement les organes vitaux. Il y a de fréquentes lésions du visage (défiguration). Des actes sexuels ante- et post mortem sont possibles. Une arme d’opportunité est en général utilisée : pieds, mains, objet contondant, arme blanche ou à feu, lien.

Le meurtre est réalisé de près et d’ordre confrontationnel, l’étranglement étant fréquent, ainsi que les blessures de défense sur la victime. Il n’y a pas de mise en scène, de maquillage du crime, le cadavre étant abandonné sans précautions. La victime est souvent connue ou de proximité. Un homicide de masse est possible.

L’arrestation de cette catégorie de meurtrier pathologique est habituellement facile car il reste sur la scène du crime ou dans son voisinage immédiat ou laisse de nombreuses traces permettant de l’identifier aisément. Il se dénonce ou se laisse arrêter sans résistance, sans chercher à échapper à la police. Une tentative de suicide après le meurtre (meurtre-suicide) n’est pas rare. Un tel type d’homicide peut être commis par un grand psychotique, mais également par un sadique sexuel passagèrement incontrôlé, un sujet traversant une crise passionnelle, existentielle, coléreuse, émotive, liée à des difficultés familiales, professionnelles ou sociales. Nous proposons schématiquement de différencier l’homicide commis par un psychotique de celui réalisé par un sujet présentant une personnalité antisociale

 

Nous avons établi une classification originale des homicides pathologiques.

Les auteurs de ces crimes souffrent d’anomalies psychiques plus ou moins importantes à l’origine de leur comportement médicolégal. Ils se différencient des délinquants dotés d’une personnalité sensiblement normale ou présentant des traits caractériels à un niveau non pathologique commettant des meurtres perpétrés librement et lucidement et dont la motivation est rationnelle et utilitaire (règlement de comptes, homicide crapuleux, par intérêt, par vengeance, euthanasique, etc) :

  • L’homicide impulsif en cas de troubles intellectuels (déficience légère) et/ou de la personnalité (antisociale ou borderline), souvent commis en état d’ivresse avec colère pathologique lors d’un conflit, d’une frustration ou d’une crise. La victime peut être un proche ou une personne inconnue de l’agresseur ;
  • l’homicide passionnel par incapacité à supporter une séparation ou une menace de rupture. La perte de l’objet entraîne une souffrance intolérable à l’origine d’un processus émotionnel et dépressif meurtre-suicide. La victime est le plus souvent le ou la partenaire comme le sont parfois les enfants du couple ;
  • l’homicide sexuel. Son auteur agit avant tout soit pour dominer la

victime, soit par colère (haine envers les femmes ou haine indifférenciée), soit par plaisir (sadisme). Le crime est d’autant moins planifié et organisé que l’agresseur est jeune, inexpérimenté, sous l’influence de la drogue ou de l’alcool, ou présente des troubles mentaux. La scène du crime reflète alors la nature spontanée et désordonnée du passage à l’acte. La victime est généralement inconnue du meurtrier. Elle est sélectionnée en cas de crime organisé ou simplement ciblée (victime aléatoire d’opportunité) en cas de crime désorganisé.

  • l’homicide dépressif. Son auteur présente une pathologie névrotique, une personnalité limite, une psychose maniacodépressive ou autre qui va entraîner ses proches dans la mort au cours d’un moment émotionnel de niveau mélancolique ou mélancoliforme. La régression fusionnelle avec la victime s’accompagne de culpabilité et de douleur morale intenses.

La victime est quelquefois consentante en cas de « pacte suicidaire ».

La motivation de l’agresseur se veut altruiste ou possessive ;

  • l’homicide psychotique non délirant. Son auteur souffre soit de schizophrénie de type hébéphrénocatatonique ou héboïdophrénique, soit de séquelles de psychose infantile sous forme de dysharmonie évolutive. La motivation est d’ordre intellectuel plus qu’émotionnel.

Le crime se produit parfois pour des causes insignifiantes dans un contexte de réaction impulsive brutale échappant à tout contrôle.

Parents et personnes proches sont les victimes les plus exposées ;

  • l’homicide psychotique délirant. Son auteur est atteint d’un état délirant aigu ou chronique en période féconde provoquant une altération importante des rapports avec la réalité. Le passage à l’acte survient habituellement dans un état émotionnel intense s’accompagnant parfois d’un niveau de conscience abaissé et d’une désorganisation de la personnalité. C’est la projection délirante sur la victime qui est à l’origine des sentiments de peur, de jalousie et de persécution motivant la réaction meurtrière défensive de l’agresseur. Là encore, les proches parents ont un risque victimologique élevé ;
  • l’homicide de cause organique. Son auteur est soit sous l’emprise d’un ou plusieurs toxiques, soit porteur d’une pathologie somatique susceptible de provoquer des perturbations émotionnelles criminogènes : trouble métabolique, tumeur cérébrale, démence, trouble du sommeil. Le meurtre est réalisé souvent au cours d’un état d’excitation confusodélirant aigu par perception erronée de l’environnement avec vécu onirique persécutoire. Parmi ces troubles mentaux organiques, il faut citer les ivresses alcooliques pathologiques et les syndromes induits par d’autres substances psychoactives : stupéfiants, antidépresseurs, stéroïdes anabolisants ;

 

  • l’homicide non classable ailleurs. Ce dernier groupe comprend une grande variété de crimes pathologiques, depuis le meurtre compulsif de motivation névrotique jusqu’au meurtre passagèrement psychotique, en passant par le meurtre réalisé par une personne souffrant d’hyperémotivité, de sentiment d’infériorité, de traits de personnalité passive-agressive.

Une telle classification est bien entendu réductrice. Un homicide passionnel a presque toujours une connotation dépressive, comme d’ailleurs certains meurtres impulsifs, sexuels ou psychotiques.

Notre classement, fondé pour l’essentiel sur l’état mental des meurtriers et leur motivation éventuelle, nous paraît cependant correspondre à la réalité clinique des homicides pathologiques.

 

  • PARRICIDE

Les auteurs de crimes familiaux sont souvent perturbés psychologiquement selon deux pôles dominants : un versant psychotique/vengeur pour le parricide et le fratricide, un versant passionnel/dépressif pour l’uxoricide et le filicide. Les parricides représentent 3 à 6% de l’ensemble des homicides. Dans leur grande majorité (90 %), ils sont commis par les fils prenant leur père pour victime]. Les adolescents parricides agissent habituellement dans un contexte non psychotique, le meurtre étant perpétré au cours d’une explosion coléreuse faisant suite à des abus répétés et à la violence intrafamiliale du père. Le souci de protéger la mère ou les autres membres de la fratrie est le mobile le plus souvent exprimé.

La proportion de troubles psychotiques parmi les adultes auteurs de parricide est plus importante. Ces crimes représentent une proportion non négligeable des homicides commis par des patients psychotiques (20 à 30 %). Contrairement à l’ensemble des parricides dont la victime est préférentiellement le père, les patients souffrant de psychoses tuent préférentiellement leur mère, la schizophrénie étant de fait le diagnostic le plus fréquent. Si le passage à l’acte est habituellement décrit comme survenant dans un contexte paroxystique et soudain, beaucoup d’auteurs de parricides expriment un sentiment ancien d’impasse relationnelle, d’étouffement, d’échec de toutes les tentatives de prise de distance.

Ils peuvent être confrontés à l’idée parricide depuis une longue période, essayant souvent d’obtenir une aide psychiatrique avant le drame.

 

  • INFANTICIDE ET LIBÉRICIDE

L’annuaire statistique de la justice en France recense actuellement de 50 à 100 infanticides ou libéricides par an, ce qui correspond à environ 5 % des homicides volontaires. L’infanticide est le meurtre ou l’assassinat d’un nouveau-né. La libéralisation de la contraception et de l’interruption volontaire de grossesse ont probablement beaucoup contribué à diminuer sa fréquence. Les auteurs d’infanticides sont presque exclusivement des mères indemnes de pathologie psychiatrique avérée et invoquant le non-désir d’enfant.

Le pic de prévalence se situe à 20-25 ans et le milieu socioculturel est souvent modeste, une activité professionnelle n’étant que rarement exercée. On observe chez ces criminelles une personnalité immature, des difficultés à communiquer, une grande solitude affective, le déni d’une grossesse souvent cachée à l’entourage et l’illégitimité de l’enfant.

Les libéricides, qui concernent les enfants plus âgés, apparaissent davantage pathologiques. Les parents sont fréquemment en cause.

Pour les victimes très jeunes, les auteurs sont plus souvent leurs mères que leurs pères, ce rapport tendant à s’inverser quand l’enfant progresse en âge . Les agresseurs souffrent de troubles dépressifs et d’idées suicidaires préexistants au passage à l’acte.

De 16 à 29 % des mères et de 40 à 60 % des pères se suicident immédiatement après le meurtre de leurs enfants. La mélancolie, les psychoses du post-partum, les pathologies délirantes aiguës ou chroniques peuvent également être en cause. Les complications de l’alcoolisme sont encore à l’origine de violences et de sévices mortels envers les enfants. Citons pour mémoire le syndrome de

Münchhausen par procuration.

 

  • AGRESSION SEXUELLE

 

Les agressions sexuelles sont particulièrement graves par leur fréquence, leur tendance à la récidive et la qualité des victimes. Deux lois (n° 94-88 du 1er février 1994 et n° 98-468 du 17 juin 1998) sont venues renforcer récemment le droit répressif français en matière de criminalité sexuelle. La plus récente, relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles, ainsi qu’à la protection des mineurs, a institué un suivi socio-judiciaire pouvant comprendre une injonction de soins. Les auteurs d’agressions sexuelles sont maintenant la catégorie pénale la plus importante dans l’institution pénitentiaire française, représentant 20 % des 51 961 personnes détenues au 1er janvier 1999. Près de 50 % des affaires jugées en cours d’assises concernent des crimes sexuels dont la moitié se rapporte à un viol sur mineur commis en milieu familial par un proche (statistiques du ministère de la Justice).

L’incidence des affections psychiatriques parmi les délinquants sexuels, à l’exception des troubles de la personnalité, de l’alcoolisme et de l’abus de substances, n’apparaît pas plus importante que dans la population générale de niveau socioéconomique équivalent. Les sujets souffrant de troubles mentaux avérés ne représentent en effet qu’une faible proportion des auteurs de crimes ou délits sexuels.

Les questionnaires de personnalité et les épreuves projectives ne permettent pas de distinguer un agresseur sexuel d’un non agresseur sexuel. Il n’existe pas de profil psychologique spécifique.

La majorité des auteurs d’infractions sexuelles sont des hommes, une faible proportion de femmes étant également retrouvée aux

États-Unis (10 %). Les adolescents sont de plus en plus fréquemment impliqués, en particulier dans les viols commis à plusieurs : 50 % des agresseurs sexuels adultes rapportent avoir commis leur premier délit sexuel dans l’adolescence. On estime que les adolescents sont responsables de 25 % des viols et de 40 à 50 % des autres agressions sexuelles sur les enfants]. Entre 20 et 30 % des viols de femmes adultes sont également le fait d’adolescents.

 

  1. Exhibitionnisme

 

L’exhibitionnisme est la paraphilie la plus fréquente, la prédominance masculine étant écrasante. La signification inconsciente de ce comportement a été rapportée à une angoisse de castration, le sujet cherchant à se rassurer sur le fait qu’il a bien un pénis. Une dimension compulsive a pu être évoquée. Une faible estime de soi avec tendance à la dévalorisation, un déficit d’habiletés sociales et de connaissances sexuelles sont des caractéristiques usuelles.

La symptomatologie débute souvent dans l’adolescence, une apparition tardive devant faire suspecter une étiologie médicale ou psychiatrique (confusion, démence, délire, manie). Des comportements exhibitionnistes sont décrits dans certaines affections neurologiques : maladie de Parkinson postencéphalitique, syndrome frontal, chorée de Huntington, épilepsie, encéphalopathie post-traumatique. Il est nécessaire de rechercher d’autres paraphilies associées. Certains meurtriers ou violeurs en série ont des antécédents d’exhibitionnisme dans l’adolescence avec une escalade dans la gravité des comportements médicolégaux. Le taux de récidive légale est un des plus importants des paraphilies, les chiffres variant de 19 à 41 %.

 

  1. Viol

 

Le viol est défini par l’article 222-23 du Code pénal français comme étant « tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature que ce soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ».

 

  • Typologie des violeurs

Depuis les travaux de Groth (1979)], de nouvelles typologies d’auteurs de viols ont été établies avec une rigueur méthodologique utilisant des méthodes statistiques (analyses de clusters) permettant d’identifier des groupes de sujets homogènes. Des facteurs tels que l’alcoolisme, l’abus de substances, la psychose, les troubles organiques ou la déficience intellectuelle n’apparaissent pas comme des critères de classification mais seulement comme pouvant influencer ceux-ci. Une personnalité antisociale est souvent invoquée. Seuls 10 % des auteurs de viol réunissent les critères du « sadisme sexuel » où la souffrance de la victime est l’unique source d’excitation sexuelle chez l’agresseur. Quatre grandes catégories (opportunisme, rage indifférenciée, motivation sexuelle et motivation vindicative) sont ainsi proposées dans la classification de Knight (1990). La typologie la plus récente des viols, en fonction des motivations et du comportement de l’agresseur, est la suivante.

 

  • Recherche de réassurance ou compensation (« power-reassurance rape »)

L’agression a une fonction de réassurance pour un violeur au vécu marqué par un manque de confiance en soi, un sentiment d’inadéquation personnelle, des doutes sur une virilité perçue comme défaillante. Il s’agit souvent d’hommes se sentant inadaptés dans la vie en général et envers les femmes tout particulièrement, présentant des difficultés à initier ou entretenir une relation, menant une vie solitaire. La victime est sélectionnée dans le voisinage et son approche a lieu essentiellement par surprise. Le violeur utilise le minimum de force nécessaire, ne voulant pas la blesser, renonçant en cas de résistance. Il tend à rassurer sa victime, s’enquérant de ses désirs et recherchant sa participation. Il peut reprendre contact avec elle après l’agression, pensant que celle-ci a été appréciée et que sa victime éprouve un sentiment pour lui.

  • Recherche de pouvoir ou expression d’un sentiment de domination

(« power-assertive rape »)

Ces violeurs ont souvent une insertion sociale plus satisfaisante.

L’égocentrisme et l’importance qu’ils attachent à leur image « virile » les caractérisent avec le sentiment d’avoir le droit d’agresser sexuellement comme expression de leur domination masculine et de leur supériorité. La victime est sélectionnée ou d’opportunité, choisie pour une vulnérabilité particulière.

Le viol a lieu avec une violence importante qui augmente avec la résistance de la victime.

La recherche du contrôle, de la maîtrise et d’une humiliation de la victime, considérée comme un objet pour les fantasmes sexuels du violeur, est au premier plan.

  • Rage (colère, vengeance ou déplacement, « anger-retaliatory rape »)

L’agression est brutale, souvent impulsive et spontanée, ayant pour but de dégrader et de détruire la victime. Le viol apparaît comme une extension de l’agression physique, les contacts sexuels étant une façon de plus d’humilier, de blesser et dégrader la victime. Un événement déclenchant est souvent évoqué dans les heures précédant l’infraction (dispute avec famille, conjoint ou employeur...), un sentiment de rage et de colère étant davantage ressenti par ces agresseurs qu’une véritable excitation sexuelle rattachable à des fantaisies déviantes. La victime n’a pas de caractéristiques particulièrement recherchées par son violeur : elle est souvent inconnue, représentative des objets de haine. Elle apparaît comme un substitut permettant le déplacement de la rage et du ressentiment envers les femmes, comme le réceptacle des pulsions agressives.

 

  • Sadisme (« anger-excitation rape »)

Les viols sont préparés et planifiés selon un imaginaire érotique violent. Ils font l’objet d’un rituel prolongé avec une érotisation des mauvais traitements infligés à la victime. L’acte sexuel et l’agression sont comme fusionnés. Les victimes sont le plus souvent inconnues du violeur mais sont sélectionnées, choisies en raison de caractéristiques particulières (âge, apparence, vêtements, statut social, vulnérabilité spéciale). Des objets (liens, instruments de torture) sont souvent apportés par l’agresseur. Les tortures impliquent de façon privilégiée les organes génitaux qui peuvent être l’objet de mutilations particulières. Les violences sont également psychologiques, le violeur prenant plaisir à terroriser sa victime en la menaçant de mort, en suscitant un sentiment de désespoir, en simulant une exécution. Il tue parfois sa victime pour ne pas être dénoncé et garde des souvenirs ou trophées de ses agressions.

Le taux de récidive est de 20 à 36 % pour les violeurs de femmes adultes ayant absorbé de l’alcool avant l’infraction ou commis des actes de violence physique lors de celle-ci. La probabilité de récidive sexuelle augmente avec le nombre de délits sexuels antérieurs, d’antécédents de comportements violents et d’incarcérations.

 

  1. Pédophilie

Les abus sexuels sur des mineurs prépubères sont fréquents, concernant un peu moins de 10 % des personnes interrogées lors d’enquêtes dans la population générale préservant l’anonymat.

Près de 20 % des femmes auraient été victimes d’abus sexuels dans l’enfance ou l’adolescence, la moitié avant l’âge de 12 ans. Les auteurs de ces violences sexuelles sont quasi exclusivement des hommes, 20 à 30 % des enfants victimes étant des garçons. La pédophilie appartient au groupe des paraphilies telles qu’elles ont été définies dans les classifications internationales actuelles. Il est nécessaire de distinguer la pédophilie primaire, dite encore d’élection ou chronique, forme la plus fréquente qui commence à l’adolescence, de la pédophilie réactionnelle ou transitoire, par remplacement ou compensation. La pédophilie peut rarement être secondaire à une affection mentale : schizophrénie, démence, déficience intellectuelle. Selon la nature de la relation affective entre l’adulte et l’enfant, il est classique de décrire une pédophilie de type « amoureux » (victime connue, activité non génitale) et une pédophilie de type narcissique-pervers (victime inconnue, actes génitalisés).

 

  • Typologies des pédophiles

 

Groth et al (1982) ont élaboré un modèle de classification en fonction du niveau de violence de l’agresseur sexuel, différenciant d’une part l’atteinte à la pudeur avec séduction, persuasion et recherche d’une réciprocité avec l’enfant et d’autre part le viol où menaces, intimidation et force physique sont utilisés. Dans ce second cas, la victime apparaît comme le réceptacle de l’hostilité du sujet ou de son désir de domination, étant investie de façon négative, dépersonnalisée, humiliée. Ces auteurs différencient « l’attentat à la pudeur » en deux types selon que la fixation (préférence sexuelle ancienne pour les enfants datant souvent de l’adolescence) ou la régression est prédominante. Knight, Carter et Prentky (1989) ont proposé un modèle de classification plus récent, aux critères diagnostiques opérationnels, en utilisant des méthodes statistiques modernes. Leur classification comprend un axe I intéressant le degré de fixation, faible ou forte, selon l’intensité des intérêts envers les enfants, et le niveau de compétence sociale. L’axe II évalue la fréquence du contact avec les enfants.

 

  1. Inceste

 

Contrairement à une opinion répandue, la proportion d’adultes auteurs d’agressions sexuelles sur des enfants inconnus est faible, l’inceste étant beaucoup plus courant. De nombreuses études confirment par ailleurs la fréquence des abus sexuels dans l’enfance des agresseurs sexuels incarcérés (un tiers des cas), ce qui pose la question de la transmission transgénérationnelle de la maltraitance.

Dans 90 % des cas, la relation incestueuse est de type père/fille ou beau père/belle-fille avec le plus souvent une complicité plus ou moins consciente et un silence implicite de la mère. Les incestes mère/fils, mère/fille, entre membres de la fratrie ou commis par un autre parent sont plus rares. Il est possible de distinguer quatre catégories d’inceste : avec échange affectif (sans violence, recherche ; d’affection, de chaleur, de contact et d’intimité avec l’enfant), érotique, agressif, furieux. La relation incestueuse peut se prolonger sur plusieurs années, la révélation étant tardive ou absente. L’inceste se rencontre dans tous les milieux mais paraît prédominer dans les familles défavorisées. La confusion des générations, l’absence de repères entre parents et enfants sont souvent invoquées.

L’alcoolisme paternel est fréquent, comme les antécédents de carences affectives et d’abus sexuels des parents. Une psychorigidité, un égocentrisme et une tendance autoritaire sont les traits de personnalité les plus souvent rencontrés chez les pères incestueux avec souci d’un conformisme social de façade. Par rapport à la pédophilie, les récidives sont moins fréquentes dans les agressions incestueuses (0 à 11 %).

 

  1. Récidivisme

 

Les facteurs pouvant favorisés l’émergence d’une activité fantasmatique sexuelle déviante ou d’une réaction coléreuse sexualisée chez les violeurs sont les situations de rejet ou de conflit avec les femmes, les déceptions face à un idéal de soi trop élevé, les problèmes liés à l’image corporelle. Les conflits avec des adultes perçus comme injustes ou menaçants, avec des personnes en situation d’autorité, ainsi que des situations de solitude et d’abandon joueraient ce même rôle chez les pédophiles. Au-delà de ces facteurs favorisants, une humeur générale négative apparaît comme étant la variable la plus fortement associée à l’émergence d’une activité imaginaire déviante. Les délinquants sexuels présentent souvent des déficits relationnels dans la confiance éprouvée envers les autres.

 

La motivation d’un agresseur à entreprendre un traitement a initialement un caractère utilitaire : éviter une incarcération, se présenter sous un jour favorable devant le magistrat, atténuer une peine. La demande de soins est presque toujours fluctuante, nécessitant un encadrement légal attentif, tout spécialement en début de traitement. Les délinquants sexuels ont par ailleurs tendance à minimiser leur problématique sexuelle, rejetant la responsabilité sur l’agressé, cherchant à se donner un rôle de victime. Il est donc essentiel de recueillir des renseignements émanant de différentes sources, telles que rapports de police, déclarations de la victime ou contacts avec l’entourage. La consultation du dossier judiciaire complet est indispensable à une bonne évaluation diagnostique, pronostique et thérapeutique. L’analyse de la carrière criminelle, la description exacte et détaillée des antécédents pénaux sont également fondamentaux, le principal prédicteur du récidivisme étant le nombre et la gravité des antécédents criminels.

Certaines variables sont décrites comme des indicateurs d’un risque prévisible de récidive. Elles sont résumées dans l’encadré qui suit.

La comorbidité psychiatrique est importante à considérer dans le risque de récidive : existence d’un trouble anxieux ou de l’humeur, usage de substances psychoactives, présence d’une autre paraphilie, insuffisance du désir sexuel et de l’érection. On estime que de 15 à 60 % des agresseurs sexuels non soignés récidivent sur une période de quelques années. Un traitement adapté est considéré comme pouvant faire diminuer de 20 à 30 % le risque de récidive et donc protéger les victimes potentielles. Il existe une sous estimation du récidivisme réel, la plupart des études évaluant l’efficacité des programmes de traitement étant fondée sur la seule récidive légale. L’hormonothérapie, les thérapies cognitivocomportementales, les antidépresseurs sérotoninergiques paraissent particulièrement intéressants.

 

  • INCENDIE CRIMINEL

 

L’incendie volontaire est une infraction grave et fréquente.

L’incendiaire primaire « type » est le plus souvent un homme jeune, d’une trentaine d’années, célibataire, sans antécédents psychiatriques ni judiciaires. Des carences éducatives dans l’enfance, un isolement social et affectif, une inhibition, un niveau intellectuel faible, une immaturité sont souvent décrits. La vengeance, la pulsion et l’attirance par le feu sont les trois motivations essentielles des incendiaires, un sentiment de colère ou de désespoir étant également fréquemment observé. Les conduites incendiaires ne sont pas spécifiques d’une affection mentale particulière, la majorité de leurs auteurs ne présentant pas de pathologie avérée. Une personnalité antisociale, une déficience intellectuelle ou un alcoolisme sont des troubles souvent rencontrés en expertise.

 

La fréquence des affects dépressifs et suicidaires chez les incendiaires a été soulignée. Le véritable pyromane est rare, sinon exceptionnel. La pyromanie est considérée comme un trouble du contrôle des impulsions dans les classifications internationales actuelles.

Laxenaire dresse le portrait de l’incendiaire récidiviste : homme jeune dans 90 % des cas – entre 15 et 25 ans – ayant subi des carences sévères dans l’enfance et présentant une schizophrénie ou un alcoolisme grave. Ses antécédents comporteraient des contacts répétés ou intenses avec le feu, en particulier des actes incendiaires ou des brûlures par imprudence dans l’enfance. Il existerait de fait une corrélation entre une fascination pathologique pour le feu chez les jeunes de 5 à 10 ans et son utilisation à l’âge adulte lors de situations conflictuelles. Pour ces récidivistes, les motivations les plus fréquentes sont la pulsion et l’attirance par le feu, la vengeance et la dimension utilitaire passant au second plan. Une ou plusieurs tentatives de suicides antérieures sont un prédicteur important de récidive. Les incendies prennent alors souvent une ampleur croissa

 

  • VOLS PATHOLOGIQUES

 

Les vols pathologiques sont à différencier des vols utilitaires, conscients et organisés. Pathologiques ou le plus fréquemment utilitaires, les vols représentent une proportion importante des infractions commises par les sujets à la personnalité antisociale et peuvent alors s’accompagner de violences envers autrui. Des vols utilitaires ou par nécessité sont également réalisés par des personnes souffrant de troubles mentaux graves sans être nécessairement reliés à leur pathologie.

Les vols pathologiques peuvent être observés au cours de nombreuses affections état démentiel (vols absurdes), déficience intellectuelle, trouble délirant (épisode délirant aigu, schizophrénie), trouble bipolaire (épisode dépressif majeur, hypomanie ou manie), état confusionnel, trouble obsessionnel-compulsif (collectionnisme), trouble dissociatif, conduite addictive, personnalité antisociale. Des vols sont également possibles dans le fétichisme (sous-vêtements féminins).

La kleptomanie est une entité nosographique considérée comme un trouble du contrôle des impulsions dans le DSM-IV .Il résulte des recherches actuelles que cette « compulsion au vol » paraît plutôt associée à des troubles anxieux ou de l’humeur qu’aux troubles obsessionnels-compulsifs, entrant préférentiellement dans le cadre des troubles affectifs (affective spectrum disorder) . Elle serait également à inclure dans le spectre des conduites addictives à l’exemple de l’alcoolisme, la toxicomanie, la boulimie, le jeu ou les achats pathologiques, toutes addictions comportementales pouvant alterner ou se superposer, renforçant ainsi la validité du concept d’addiction, de trouble multi-impulsif.

 

 

Bibliographie

 

  • Thierry Albernhe, ellipses 1997, criminologie et psychiatrie
  • Bénézech P Le Bihan ML Bourgeois, encyclopédie. médical 2010, criminologie et psychiatrie.
  • Christine Fidelle, Master de droit pénal et sciences pénales 2010.
La personnalité criminelle
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P
Merci pour ces informations très constructives et nous aidant dans la compréhension des différentes personnalités des auteurs d'abus, violences et maltraitance infantile.
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